Depuis des millénaires, la production d’huile d’olive en Tunisie rythme le quotidien et les moeurs des habitants. ‘’L’or liquide’’ constitue en effet une grande richesse pour le pays et en fait la fierté. Il n’en demeure pas moins que cette grandeur est rarement reflétée dans l’image des huileries contemporaines; Celles ci s’expriment généralement par une architecture rigide et purement technique.
À travers l’huilerie du domaine Segermès, Adel Hidar brouille les codes conceptuels et nous mène à travers son architecture sur les routes de la genèse de l’huile d’olive …
Un site chargé d’histoire
Située au Nord Est de la Tunisie, entre le massif rocheux de Zaghouan et la plaine de Bouficha, l’huilerie de Segermès se niche dans une vaste étendue d’oliveraies. Ce site est fortement marqué par l’histoire de la région. L’histoire d’une nature luxuriante, d’oliviers mûris et bercés par les temps mais aussi d’une Tunisie millénaire et multiculturelle; Le domaine emprunte alors son nom à la ville Romaine de Segermès qui s’élevait autrefois dans ces lieux. De surcroît, il accueille une église et un baptistère byzantins ainsi qu’une ferme coloniale.
Entre parcours et confluence
Le site et ses particularités ont naturellement guidé l’implantation du projet. C’est à la croisée des oliveraies et de leurs directions multiples que l’huilerie prend racine dans la terre et accorde ses niveaux par rapport aux éléments qui l’entourent: Elle s’ouvre au sud sur le bassin d’eau et entre en dialogue avec la basilique et au nord sur le spectacle infini des oliviers. L’huilerie se mue à la fois en belvédère et en vitrine, offrant différents points de contemplation sur le paysage et appelant à être contemplée.Un fin équilibre entre pause et transit rythme le vécu du projet. Celui-ci se découvre au fil d’une promenade ponctuée d’éléments architecturaux marquants. La promenade commence le long d’une rampe et s’ouvre sur une agora : c’est le seuil de l’huilerie et une première pause sur le paysage. De là, un chemin de terre menant à l’ancienne ferme nous révèle un jardin de sculptures mettant en scène des morceaux de vestiges découverts sur le site. Au nord, la promenade se prolonge à l’intérieur du bâtiment et culmine au niveau d’un volume cylindrique en double hauteur qui abrite les silos de stockage d’huile.
Vitrine d’un savoir faire local
La huilerie de Segermès s’affirme comme la vitrine d’un savoir-faire local à bien des égards. Outre les étapes de production d’huile d’olive et les vestiges qui y sont valorisés et partagés avec le public, l’architecte puise dans son environnement jusqu’aux matériaux de construction. Il emploie, dans la composition des façades, des pierres locales ramassées sur place et appareillées à la main par des ouvriers locaux spécialisés.
Ainsi de par son architecture, l’huilerie vient écrire une nouvelle page dans l’histoire du domaine et marque son temps comme l’ont marqué avant elle, Segermès la romaine, la basilique byzantine et la ferme coloniale.
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