Amine Bellalouna est architecte, urbaniste et enseignant. Dans cet article, il partage en exclusivité, avec nous, une partie de l’excellent travail qu’il est en train de produire sur le sud tunisien et plus particulièrement sur l’architecture de ce magnifique village de Douiret. Un avant goût en attendant la suite.
La région de Tataouine au sud tunisien rassemble plusieurs villages troglodytiques creusés horizontalement dans la montagne. Nous pouvons citer le village de Chenini, Guermassa, Ghomrassen, Douiret, Beni Barka et autres moins importants. Par ailleurs, la composition géologique du djebel est faite par une alternance de couches rocheuses et argileuses. Cette stratification a donc permis le développement de ces architectures troglodytiques creusées horizontalement dans la montagne. Cette morphologie urbaine en étage vient épouser les courbes de niveau du djebel et se développe du plus haut vers le plus bas.
Le village berbère de Douiret se situe à environ 21 km au sud-ouest de Tataouine. C’est l’un des villages berbérophones les plus importants de la région. Cette architecture invisible remonte au XIe siècle. Le ksar a été sans doute construit pendant la période des invasions hilaliennes ; les habitants de Douiret devaient donc protéger à leur tour leurs précieuses récoltes des razzieurs. En effet, le village de Douiret s’étire à mi-flanc du piton, à droite et à gauche, sur environ 3 km de long. Cette configuration spatiale donne à l’ensemble du village l’aspect d’un S dessiné nettement par un chemin de ronde (Charaà).
C’est pour cela que nous retrouvons en avant du patio un ensemble construit, sur un ou deux niveaux, servant de stockage pour les réserves. C’est un véritable quartier d’engrangement qui vient donc s’ajouter aux différentes unités d’habitation troglodytiques du village.
Ces constructions sont fermées de l’extérieur sauf pour les pièces destinées au bétail. Il est à noter que le RDC peut abriter la fonction d’écurie ou de dépôt. Ce dernier est destiné pour les outils agricoles ou encore le bois utilisé pour la cuisson et la nourriture. Notons que les étages sont toujours destinés aux stockages des réserves alimentaires afin de les protéger des bestioles.
Les contraintes structurelles et de stabilité de la roche ainsi que les données climatiques arides de la région ont engendré un ghar qui donne l’impression d’un couloir profond. En effet, la hauteur est limitée par les deux couches rocheuses de la montagne variant ainsi de 1.8 et 2.4 m. Dans le cas du village de Douiret, la largeur des habitations troglodytiques ne dépasse pas généralement les 3 m.
Amine BELLALOUNA
Architecte UIK / Enseignant titulaire à l’UIK
Urbaniste ENSAPLV / Doctorant ESSTED